La musique

Entrez dans la folle journée des Noces de Figaro avec l’enregistrement légendaire de Carlo Maria Giulini, porté par un plateau de solistes d’exception mené par Elisabeth Schwarzkopf.

L'essentiel
  • Le premier opus de la trilogie Mozart/Da Ponte : une réussite absolue qui préfigure celles de Don Giovanni et de Così fan tutte
  • Une mise en scène au charme visuel indéniable où souffle l’esprit de Beaumarchais et de Pirandello !

L’héritage

« Ne devez-vous pas me passer un peu de morale en faveur de ma gaieté, comme on passe aux Français un peu de folie en faveur de leur raison ? »

(Préface du Mariage de Figaro, 1778)

Combien de « folles journées » la comédie de Beaumarchais aura-t-elle inspiré ? L’auteur lui-même aura dû batailler avec une énergie infatigable pour assurer la diffusion de sa pièce à coups de plaidoyers pour un théâtre éclairé. Pour s’accommoder de leurs propres censeurs, Mozart et Da Ponte s’autorisent des coupes mais préservent l’audace critique du modèle original en lui associant les charmes et l’astuce d’une musique capable de redoubler l’ironie des mots, avec toujours l’insolente légèreté d’une inspiration inépuisable. À la création des Noces en 1786, le public ne boude pas son plaisir. Impossible, en effet, de résister à la succession d’airs et ensemble virtuoses, au piquant des situations et des caractères en présence, que le propos subversif de la pièce permet de traiter avec une invention égale. Figaro est bien le rival de son maître lors de leurs joutes verbales et Suzanne et la Comtesse chantent à parts égales dans le duo de l’acte III ; une rupture avec l’interdiction faite aux personnages de domestiques d’accéder aux vocalises. Au-delà de la satire sociale et des types qu’elle requiert, Mozart fait une peinture subtile des sentiments des personnages, comme dans l’air « Hai già vinta la causa », où l’orchestre partage les doutes que le Comte cherche à déguiser en feignant l’assurance, dans l’air de Chérubin ou dans la plainte de la Comtesse, l’une des pages les plus déchirantes imaginées par le compositeur. Du frémissement juvénile de Suzanne à la féminité épanouie de sa maîtresse en passant par la vindicte de Marcelline, les portraits de femmes sont l’occasion d’une riche exploration de la psychologie humaine et de la condition féminine de l’époque… Et peut-être encore d’aujourd’hui. 

Le parti pris

« Hommes plus qu’ingrats, qui flétrissez par le mépris les jouets de vos passions, vos victimes ! […] Ah ! sous tous les aspects, votre conduite nous fait horreur ou pitié ! »

(Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, Acte III, Scène 16)

Le théâtre, fût-il l’héritier des Lumières et de Beaumarchais, est-il vraiment le lieu de toutes les subversions ? Son entreprise fait-elle vraiment illusion dès lors que l’on regarde en coulisses, quand les conditions de production de la fiction reproduisent en fait les principes mêmes de la réalité que la scène aspire à déjouer ? En se reportant à l’essence théâtrale de l’œuvre de Mozart et de Da Ponte, Netia Jones transpose l’action dans le microcosme d’une maison d’opéra, où se retrouvent « les commérages, le sens de la famille, les structures de pouvoir, les secrets, les intrigues, la fête ». Avec humour, et dans un jeu subtil d’anachronismes justifié par le choix du lieu, la metteuse en scène souligne la permanence des privilèges « du pouvoir politique et masculin », l’actualité des inégalités de classes et de genres dans nos sociétés. Le Comte et la Comtesse forment ainsi un couple de chanteurs vedettes, qu’apprêtent un Figaro perruquier et une Suzanne costumière dans l’environnement des petits rats dont la grâce n’échappe pas à ce Comte éhonté, bien convaincu d’être le maître des lieux et de son droit à disposer des femmes selon son gré ; une transposition loin d’être anodine dans un espace comme le Foyer de la Danse. Et pendant que certains se demandent si tout cela n’est qu’un jeu, la résistance s’organise pour ramener les lumières en coulisses.  

Au cœur de la production

Loges d’artistes avec piano droit et méridienne, vestiaire boisé des choristes, studio de danse, ateliers et magasin de costumes, scène quadrillée de repères techniques : dans une scénographie à la Robert Carsen, Netia Jones donne à voir l’envers du décor du Palais Garnier et ses incessantes reconfigurations, par où se confondent les époques, le réel et l’artifice, et toujours ces nuances de rouge, qui valent aussi bien pour le signe du désir et de la passion que celui de la révolution.

OPÉRA BUFFA EN QUATRE ACTES,1786

En langue italienne

Mise en scène

NETA JONES

Reprise (création : 2022)

Direction Musicale

ANTONELLO MANACORDA

Distribution*

GORDON BINTNER / VARTAN GABRIELIAN

FIGARO

SABINE DEVIEILHE / ILANAH LOBEL-TORRES

SUSANNA

HANNA-ELISABETH MÜLLER / MARGARITA POLONSKAYA

LA CONTESSA DI ALMAVIVA

CHRISTIAN GERHAHER / JEROME BOUTILLIER

IL CONTE DI ALMAVIVA

Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris

3h30 avec 1 entracte

*pour les dates précises de distribution, se référer au site internet de l'Opéra national de Paris.

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