La musique

L’immense Renata Tebaldi, incandescente Tosca, transperce et bouleverse dans cet enregistrement de référence, aux côtés de Placido Domingo et Renato Bruson.

L'essentiel
  • Une œuvre incontournable du répertoire lyrique
  • Une mise en scène déjà devenue un classique du répertoire de l’Opéra
  • Deux distributions de classe internationale avec, dans la première, la présence de Roberto Alagna puis de Jonas Kaufmann et dans la deuxième, celles de Sondra Radvanovsky et de Freddie De Tommaso, qui fera à cette occasion ses débuts à l’Opéra

L’argument 

Rome sous occupation autrichienne, juin 1800. Le peintre Mario Cavaradossi a aidé le repris de justice en cavale, Cesare Angelotti, à échapper à la police politique dirigée par le baron Scarpia. Il est arrêté. Tosca, sa maîtresse, cantatrice jalouse et impulsive, se présente chez le chef de la police pour tenter de faire libérer son amant. Scarpia promet à Tosca d’épargner Cavaradossi si elle s’offre à lui. Persuadée qu’elle sauvera Mario, elle fait mine de céder, et Scarpia donne des ordres pour un simulacre d’exécution. Une fois l’ordre signé, Tosca tue Scarpia et sauve ainsi son honneur. Malheureusement, l’exécution se fait à balles réelles. Mario meurt. Tosca se jette dans le vide, après avoir maudit Scarpia.

L’héritage 

« Je suis un homme de théâtre. Si, quand je suis enfermé dans mon bureau, je ne réussis pas à m’imaginer ouverte à deux battants la grande fenêtre de la scène, et les personnages qui chantent et qui gesticulent d’une manière si claire et si tangible que je puisse les appeler et les entendre répondre, je n’écris pas »

(Giacomo Puccini)

Avant de devenir l’un des opéras les plus populaires de l’Histoire, Tosca est d’abord une pièce imaginée par Victorien Sardou, héritier de Scribe, et une héroïne taillée à la mesure du talent de Sarah Bernhardt. Quoiqu’on reproche au premier d’épancher sa « soif de sang » dans « de gros faits qui crèvent les yeux », on loue chez l’interprète ses « cris de panthère blessée » et sa « voix d’airain » (Le Temps, Journal des débats, 1887). L’un et l’autre font forte impression chez Puccini qui, en épurant l’intrigue de ses personnages subsidiaires – là où aurait pu attendre qu’ils inspirent de grands mouvements de chœurs – porte le drame romantique et l’expression des passions à de nouveaux sommets. Efficacité, puissance, variété et vérité : l’ouvrage redouble tous les effets du modèle original, en s’ouvrant in medias res par un grand geste symphonique où retentit le motif de Scarpia et la panique du fugitif, en privilégiant la fluidité du discours musical – du fondu-enchaîné avant l’heure – en ouvrant l’espace de la représentation à l’hors-champ (les canons de Saint-Ange, les tortures infligées à Mario, le chant du berger), en superposant des espaces sonores distincts (le Te Deum et la confession sacrilège de Scarpia) ou en entretenant encore, dans un dernier duo d’amour fragmentaire, les décalages entre les différentes instances de la narration, les voix et l’orchestre, pour renforcer le sentiment du tragique et de l’omnipotence du pouvoir coercitif. Mais la course folle de Tosca comprend aussi ses stations lyriques : faire d’une diva le centre d’un ouvrage d’opéra l’imposait. Aux côtés du célèbre « Vissi d’arte », se dressent aussi, immortels, « Recondita armonia » et « E Lucevan le stelle » de Cavaradossi, où s’affirme la supériorité absolue de l’idéal et de la poésie sur les désastres de la vie ; un air que Puccini impose à son librettiste, sûr de son intuition, et de sa musique, « écrite », dira-t-il, « par Dieu d’abord, par [lui] ensuite ». La création à Rome subira l’un de ses échecs improbables, suivi d’un succès international : souvent les deux faces d’une même médaille pour le compositeur. 

Le parti pris

Entre vraisemblance historique et stylisation, faste et brutalisme, la mise en scène de Pierre Audi se déploie dans trois tableaux distincts, tous unis par la même sophistication visuelle, jusque dans leurs plus infimes échos : le sacré des prie-Dieux et des cierges côtoyant le profane de la fresque érotique et du panier de victuailles au premier acte, la lunette astronomique et la sphère ancillaire de Scarpia lovées dans les tons carnassiers de son salon style empire comme autant de révélateurs de ses perversions, et les arbres décharnés comme autant de gibets dans le campement militaire au dernier acte. Attentive à la « mécanique tragique » de l’œuvre, la lecture du metteur en scène insiste sur la toute-puissance de l’appareil politico-religieux qui préside au destin des personnages par l’entremise du baron, auquel le costume et la posture confèrent ici un relief prémonitoire, qui tisse le fil entre la dérive autoritaire dont Puccini est le témoin en son temps et l’ombre fasciste qui s’étendra vingt ans plus tard sur l’Italie.

Au cœur de la production

Surplombant la scène, une immense croix fait d’emblée planer la menace et le mystère sur l’intrigue de Tosca, rappelant la théâtralité commune à la religion et au pouvoir. Tous les personnages vont et viennent sur cette croix au premier acte à l’exception des deux artistes. Sur l’arrière-plan lumineux qui émerge au fil des tableaux, cette présence monolithique ne cesse de se faire plus ambiguë, signe d’un jugement impitoyable, d’une fatalité intérieure ou d’un possible salut, agent de l’assujettissement des hommes ou memento mori nécessaire. 

MELODRAMMA EN TROIS ACTES, 1900

En langue italienne

Mise en scène

PIERRE AUDI

Reprise (création : 2014)

Direction Musicale*

OKSANA LYNIV / JADER BIGNAMINI

Distribution*

SAIOA HERNÁNDEZ / SONDRA RAVANOVSKY

FLORIA TOSCA

JONAS KAUFMANN / YUSIF EYVAZOV

MARIO CAVARADOSSI

LUDOVIC TÉZIER / GEVORG HAKOBYAN

IL BARONE SCARPIA

Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris

2h50 avec 2 entractes

* pour les dates précises de distribution, se référer au site internet de l'Opéra national de Paris.

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