Pour vous préparer à ce chef-d’oeuvre de la musique tchèque, écoutez l’interprétation enlevée de Sir Simon Rattle, à la tête du London Symphony Orchestra.
L’essentiel
• Une fantaisie lyrique pleine de rythmes et de couleurs, pour petits et grands.
• Un opéra d’atmosphère, véritable bijou d’orchestration.
• Une distribution emmenée par l’incomparable Elena Tsallagova dans le rôle de la renarde, et dirigée par un spécialiste du répertoire tchèque, le slovaque Juraj Valčuha.
Une petite renarde, Bystrouska, qui a réussi à échapper à la vigilance du garde-chasse qui l’avait capturée, rencontre en été un renard : ils tombent amoureux l’un de l’autre et se marient. La saison suivante (automne), alors qu’elle se promène en compagnie de son « mari » et de sa première portée, elle tombe sur Harasta, un braconnier qui porte sur son dos un panier rempli de poulets. Elle tente de chaparder le contenu du panier mais le paie de sa vie. Dans la forêt, le garde-chasse, alors qu’il s’était endormi, est réveillé par une petite renarde, qui n’est autre que la fille de Bystrouska. Il essaie de l’attraper en se promettant de l’élever mieux que sa mère mais sa main se referme... Sur une grenouille.
Amusé par les aventures d’une petite renarde croquée dans les pages de son journal local, Janáček s’attelle en 1922 à la rédaction d’un étonnant livret où hommes et animaux se partagent la parole. Avec la malice et la sagesse des vieux conteurs, le compositeur signe un hymne à la vie et à la nature, d’une féérie et d’une poésie sans pareilles dans le répertoire lyrique. La musique y est d’une grande richesse, servie par des intermèdes variés et une orchestration rutilante, pleine des couleurs et des bruissements de la forêt. Privilégiant des thèmes courts, de petits motifs mélodiques folkloriques et un traitement vocal au plus proche de la prosodie de la langue tchèque, la composition exhale les charmes de la miniature et témoigne d’un sens inouï de la caractérisation musicale. La petite renarde, élan vital personnifié, retrouve chez Janáček toute sa liberté dans le chant, par lequel elle s’unit ou se défend. Le livret en fait une dissidente légitime, dans laquelle parvient toujours à se manifester le sursaut de la volonté et du désir. Empreinte d’ironie et de tendresse panthéiste, La Petite Renarde rusée formule aussi bien une leçon de courage et de subversion qu’une invitation à l’amour et à la contemplation, à trouver la paix dans la célébration de l’éternel recommencement. En répétition, Janáček demandera que soit jouée à ses funérailles la dernière scène de l’ouvrage. À Hukvaldy, son lieu de naissance, c’est finalement sous une petite silhouette de renarde que le compositeur repose.
André Engel rejoue l’histoire dans une mise en scène qui déploie ses tableaux à la manière d’un livre d’images ou d’une bande dessinée. Baignée dans les couleurs et les lumières de l’enfance, son interprétation demeure fidèle à la merveille, l’humour et la mélancolie du conte de Janáček. La petite renarde y évolue bien au rythme des saisons, sa silhouette fauve tranchant sur le blanc d’un tapis de neige ou sur les couronnes solaires d’un champ de tournesols. De la même trempe que les mornes structures dans lesquelles s’abrite le monde domestiqué, un chemin de fer tente d’imposer aux êtres le sens de leur destinée. « Blessure d’acier » qui dit la difficile cohabitation de l’homme avec le reste du vivant, les rails sont aussi un lieu de rencontres et de passages, assurant un lien entre les mondes : humain et animal, prosaïque et poétique, entre les générations présentes et celles à venir, pour lesquelles il vaut toujours la peine d’envisager la suite du chemin.
Janáček imaginait des animaux chantant et dansant. André Engel chorégraphie les apparitions de chacun des personnages avec un soin particulier, donnant vie, par le geste et des costumes dont l’intelligence enchante, à l’amusant et émouvant bestiaire du livret ; bestiaire dont on ne sait plus trop, parmi ces créatures anthropomorphes, s’il est juste d’en extraire l’homme, drôle d’animal qu’il est lui-même en mal d’amour et de liberté.
OPÉRA EN TROIS ACTES, 1924
En langue tchèque
ANDRÉ ENGEL
Reprise (Création : 2008)
JURAJ VALČUHA
LE GARDE-CHASSE
IAIN PATERSON
L’INSTITUTEUR, LE MOUSTIQUE
ÉRIC HUCHET
LE PRETRE
FRÉDÉRIC CATON
LE VAGABOND
MILAN SILJANOV
LA RENARDE
ELENA TSALLAGOVA
LE RENARD
PAULA MURRIHY
LE CHIEN
MARIA WARENBERG
L’AUBERGISTE
SE JIN HWANG
LA FEMME DE L’AUBERGISTE
ANNE-SOPHIE DUCRET
LE COQ, LE GEAI
ROCIO RUIZ COBARRO
LA POULE HUPPEE
IRINA KOPYLOVA
LE PIVERT
MARIE-CÉCILE CHEVASSUS
LE BLAIREAU
SLAWOMIR SZYCHOWIAK
Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris
Avec la Maîtrise des Hauts-de‐Seine / Chœur d’enfants de l’Opéra national de Paris
2h05 avec 1 entracte